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Actualité de la rénovation à gauche
26 juin 2007

Un discours de qualité de Bertrand Delanoë

Bertrand Delanoë

Mes chers camarades,
Les Français se sont exprimés. Une période s’achève, un cycle commence. Prenons d’abord conscience qu’en presque cinquante ans de Vème République, nous n’avons gagné que trois élections nationales : en 1981, 1988 et 1997. Cette dimension presque exceptionnelle de nos succès, nous devons l’intégrer à une évaluation lucide de ces trois victoires. Et de ce que nous avons fait de chaque période qu’elles ont ouverte ! Car l’autocritique partielle devient partiale et donc sans grande portée, si elle ne s’appuie pas à la fois sur nos insuffisances passées, bien sûr, mais aussi sur nos réussites au pouvoir, qui ont réellement fait progresser la société française.

Ce qui caractérise également ces trois dates, c’est la conjonction d’une situation politique bien appréhendée, d’un projet identifié et d’un leader dont l’ambition légitime est mise au service d’un dessein collectif qui le dépasse. Cette analyse doit nous servir pour assumer les devoirs qui nous engagent, maintenant. D’abord, incarner une opposition intelligente, exigeante et réactive face à la droite. Cette droite qui s’est mise délibérément au service d’une minorité de la population, en creusant les inégalités de revenus et de patrimoine. Ses projets fiscaux, par exemple, engendrent un coût énorme : 1% du PIB, avec un impact sur la croissance qui, dans le meilleur des cas, ne dépassera pas 0,2% ! La détaxation des heures supplémentaires qui, d’évidence, sera un frein à l’embauche.

Et celle des intérêts sur les prêts immobiliers, qui provoquera une nouvelle flambée des prix du logement. S’opposer donc, à ce choix de société. Mais dans le même temps, nous devons honorer un autre devoir : enclencher la machine à inventer, à proposer, à construire l’avenir. Cet avenir, mes amis, c’est celui de la France dans un environnement mondialisé. Nier la mondialisation ne sert à rien : elle est là, et nous devons rechercher, à cette échelle, les termes d’un nouveau compromis social et économique. Car nous n’avons pas le droit de renoncer à la notion même de progrès. Face aux questionnements des Français, nous n’avons pas mené cette réflexion assez loin.

Etre socialiste aujourd’hui, c’est admettre que l’économie de marché n’est plus un objet de débat, c’est un fait.

Oui, nous sommes pour le partage des richesses, mais nous savons qu’avant de les partager, il faut d’abord vouloir en créer, et donc, s’en donner les moyens. Pour cela, nous devons devenir le parti de la croissance au service de la justice sociale. Notamment en faisant le choix de la recherche et de l’innovation, c’est-à-dire l’inverse même de ce que fait l’UMP depuis 2002. Par exemple, à l’heure où les Français sont les premiers utilisateurs privés d’Internet en Europe, comment capitaliser sur cet atout dans le secteur productif ? A quand un Google ou un Yahoo français sur la scène mondiale ? J’ajouterai qu’être socialiste, aujourd’hui, c’est aussi revendiquer l’écologie comme composante de notre identité. C’est porter une autre façon de produire, de consommer, de redistribuer.

C’est prendre conscience de notre responsabilité historique face à l’urgence environnementale qui est devenue un enjeu vital ! Et pour relever ce défi - le plus décisif peut-être de l’ère contemporaine - je ne fais confiance qu’à la gauche.

Plus que jamais d’ailleurs, je crois en la pertinence d’un clivage intellectuel et philosophique entre la gauche et la droite. Et nous aurions tort d’intérioriser cette théorie de la droitisation inéluctable de notre Société. Notre devoir de créativité, aujourd’hui, c’est de se réapproprier des ambitions qui appellent des réponses progressistes. Sans tabou. Car être socialiste, c’est aussi revendiquer la reconnaissance et la promotion de chaque individu, ou assumer, sans complexe, les besoins d’ordre et de sécurité.

Et même incarner une identité nationale, que nous concevons comme enrichie, au fil de l’Histoire, par des apports et des cultures multiples ! Sur tous ces sujets, nous devons dire ce que nous sommes, en donnant un prolongement concret à nos valeurs. Car la laïcité, l’égalité des droits, la démocratie, ce ne sont pas des slogans, mais les fondements même de notre engagement !

J’y ajouterai l’éthique : parce qu’elle forge une culture collective, qu’elle consiste d’abord à respecter sa propre famille, et peut-être même à éclairer de sa lumière, chaque prise de décision. Précisément, si les Français ne nous ont pas donné de majorité, c’est parce que le peuple ne choisit pas ceux qui ne savent pas choisir.

Notre voie, nous ne la trouverons ni dans les concepts d’un autre temps, ni dans des formules qui masquent l’absence de fond, ni même dans des synthèses qui ne seraient pas le produit d’un vrai accord, construit dans l’exigence.

Entre la nostalgie et le marketing, mes chers camarades, il y a le socialisme du XXIème siècle !

Notre ambition, c’est de capter et de mettre en mouvement toute la richesse des forces qui s’inscrivent dans le réel, sont attachées au pluralisme démocratique, expriment une envie d’Europe et une volonté farouche de se battre pour la justice sociale. C’est pourquoi le parti socialiste doit devenir le « mur porteur » de l’édifice du progrès. Ce progrès qui désigne un vaste horizon, ne le réduisons pas par des jeux d’appareils, donnons-lui une vraie chance, par les idées.

François nous a proposé un calendrier de travail : j’y souscris, pour l’essentiel. Car oui, nous avons du boulot ! Ce travail en profondeur implique autant d’humilité que d’ambition collective. Et donc le sens du temps. Ayons en effet la sagesse d’admettre que nous ne trouverons pas en quelques mois, ce que nous cherchons depuis cinq ans. L’heure est venue d’ouvrir notre famille à des sources diverses : citoyens, associations, syndicats, intellectuels, experts et bien entendu, forces progressistes d’Europe et du monde. Chacun doit nous inspirer dans cette recherche, mais pour aboutir, nous devons nous rassembler. Les Français nous le demandent. Nos militants aussi.

Les respecter, c’est respecter la légitimité et le potentiel de force de notre parti.

Non à l’immobilisme, mais oui à l’unité ! L’unité, qui est une condition du mouvement. Une condition pour mériter de convaincre, demain, une majorité de citoyens.

Oui, chers camarades, le progrès a besoin des socialistes, et la France a besoin du progrès !

Cn du 24 juin 2007

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