Le ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale de Nicolas Sarkozy fait bondir ses adversaires
La proposition de Nicolas Sarkozy de créer un "ministère de l'Immigration et de l'Identité nationale" a été vivement critiquée vendredi par ses adversaires, tout comme la perspective d'une nouvelle loi sur le sujet. "Une frontière a été franchie", a jugé François Bayrou, tandis que François Hollande déplorait "un flirt poussé avec les thèses du Front national".
Lors de l'émission "A vous de juger" sur France-2, le candidat de l'UMP a redit jeudi son souhait de renforcer à nouveau les conditions d'accès au regroupement familial par une loi qui imposerait aux familles des étrangers installés en France d'apprendre le français, "ou en tout cas des rudiments de français avant de venir en France". Il a réaffirmé sa volonté de créer un grand ministère regroupant toutes les compétences liées à l'immigration.
Alors que le projet adopté par l'UMP prévoit un ministère baptisé "de l'Immigration et de l'Intégration", Nicolas Sarkozy a choisi d'utiliser l'expression "de l'immigration et de l'Identité nationale". Le lien entre les deux termes "est tout aussi nécessaire qu'opportun", ont justifié ses porte-parole Rachida Dati et Xavier Bertrand dans un communiqué. "Nous pensons, en effet, qu'il ne peut y avoir d'immigration réussie sans intégration, et pas d'intégration sans connaissance et respect des valeurs de la République française."
"La France est un pays qui s'est ouvert qui a toujours été ouvert et ceux que nous accueillons doivent prendre en partage cette histoire et ces valeurs", a expliqué Nicolas Sarkozy en déplacement en Normandie. "Dans les valeurs de la France, de l'identité de la France, il y a la laïcité, il y a l'identité, il y a la République", a-t-il détaillé. Ecartant les "petites polémiques", il a jugé que les termes "identité nationale" "ne sont pas des gros mots".
Ces déclarations de Nicolas Sarkozy sont "un constat d'échec", a au contraire estimé le premier secrétaire du Parti socialiste François Hollande, qui a rappelé sur France-Info que le ministre de l'Intérieur "depuis cinq ans, a fait voter deux lois sur l'immigration". "Et maintenant dans la campagne présidentielle, tout à trac, il nous annonce une nouvelle loi, un nouveau ministère".
Pour le candidat UDF à la présidentielle François Bayrou, "une frontière a été franchie" par le ministre de l'Intérieur. "Qu'on ait un ministère pourquoi pas? Mais enfermer dans la même phrase immigration et identité nationale", a-t-il analysé sur Europe-1, s'interrogeant sur "ce que cela cherche à évoquer".
"Accoler immigration et identité nationale renvoie aux épisodes les plus sombres de notre histoire", a renchéri la candidate communiste Marie-George Buffet dans un communiqué. Les déclarations de Nicolas Sarkozy visent à "donner des gages aux thèses xénophobes et racistes du Front national", ce qui "est indigne d'un candidat républicain", a-t-elle jugé. Pour elle, "Nicolas Sarkozy est un homme politique dangereux".
Sans réellement critiquer la proposition de Nicolas Sarkozy, le FN dénonce "une petite opération de racolage" sur ses terres et réserve ses critiques à François Bayrou. Le candidat centriste est accusé, dans un communiqué, d'interdire "de penser que l'immigration puisse porter atteinte à l'identité nationale, alors que l'histoire et l'actualité nous montrent qu'il s'agit d'une terrible réalité".
Quant au candidat "gaulliste et républicain" à la présidentielle, Nicolas Dupont-Aignan (ex-UMP), il a jugé "surréaliste que le ministre de l'Intérieur, qui a été cinq ans au pouvoir, qui nous a fait voter je ne sais combien de lois, propose maintenant un ministère". Interrogé sur LCI, le président de "Debout la République" a préconisé "la suspension du regroupement familial qu'il faut oser accomplir".
"Nicolas Sarkozy n'hésite par à flirter avec les pires heures du passé", commente le MRAP, tandis que SOS Racisme affiche sa "totale désapprobation". L'association s'étonne également de voir le ministre adopter "une vision de l'identité nationale aussi rétrécie et conservatrice alors qu'une des grandes richesses de la France, c'est justement d'avoir su, à chaque époque, recomposer, adapter, enrichir cette identité".
France Terre d'Asile a dénoncé "un clin d'oeil appuyé aux électeurs du Front national". Dans un communiqué, son directeur général Pierre Henry se demande ce qu'est l'identité nationale dans un pays "où un Français sur quatre a un parent ou un grand-parent immigré". AP
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